Je ne veux plus souffrir...

Je ne veux plus souffrir...

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Amour, PhiloSex

12 Jan 21

Souvent j’entends et je lis cet appel au secours des meurtris de la relation. Ils ont aimé, joui, et souffert. Et il ne reste à la fin que le goût amer du chagrin dans leur coeur brisé. Cette souffrance est tellement plus forte que les bons moments partagés qu’elle fonctionne comme une cuirasse les protégeant de tout autre abandon aux plaisirs d’une nouvelle rencontre. Chat échaudé craint l’eau froide.

Ce n’est pas parce que « je ne veux plus souffrir », que je ne peux plus aimer
On souffre parce qu’on reste dans une situation qui ne nous convient pas. On est pas dans la configuration type : « Je suis amoureux et suis bien dans ma relation ». On peut être bien avec quelqu’un aussi longtemps que la relation est épanouissante. Il s’agit de ne pas confondre aimer quelqu’un et être bien avec quelqu’un. Le fait que l’on aime l'autre n’est pas une raison suffisante pour rester auprès de l’élu. On reste parce que l’on est bien et que ça nous rend heureux. Si on l’aime mais qu’on n’est pas heureux, il faut commencer à questionner la relation avant de rentrer dans la souffrance (ou sans trop longtemps y traîner !).

La relation a sa vie propre…
Une relation se crée au contact de deux personnes. Elle fait appel à une infinité de données conscientes et inconscientes. Elle vient toucher, réveiller des zones d’ombre. Inexplorées. D’où ce sentiment de surprise, d’être désarçonné, ce coup de foudre. C’est l’inédit comme dit Anne Dufourmantelle. L’autre vient chatouiller ces espaces en nous endormis pour les réveiller à la vie, pour nous faire découvrir d’autres parties de nous et du monde, celles-ci même qui résonnent au contact de l’autre. C’est la magie de la rencontre.
Mais cette magie de la rencontre ne peut être tricotée unilatéralement de manière à devenir une relation. C’est comme une partie de tennis : le suspens est présent à chaque balle, chaque set, chaque match. Le vent, le sol, l’ambiance, le public, le passé, l’entraînement et/ou l’état d’esprit des joueurs fera varier les échanges. Chaque joueur est différent. Chaque match est différent, unique, de même que chaque rencontre entre deux mêmes joueurs, entre deux mêmes amants. Il faut laisser faire la vie, faire confiance, être à l’écoute, ne pas trop la définir ni l’enfermer, la laisser vivre…

… et elle ne nous touche pas toujours de la même manière
Il se trouve que, parfois, l’autre fait bouger des choses en moi et que ça m’émeut mais que, parfois, je ne suis pas ou plus celle, ou pas ou plus au moment où, ou encore pas ou plus à l’endroit qui fait aussi bouger des choses en l’autre. Parfois il se trouve que les besoins de l’un à l’endroit de l’autre n’ont pas ou plus la même intensité (je t’aime et tu m’apprécies). Ou bien que l’intensité y soit, mais pas le contexte (on s’aime mais pas au point de remettre nos choix de vie en question). Ou bien que l’intensité, quand bien même elle soit partagée, se suffise au lieu et au moment du partage (je suis à l’écoute de ces parties de moi que tu fais frétiller mais je circoncis mes émotions en temps et lieu).
Dans tous ces cas je dois trouver là l’équilibre entre l’abandon à la nouveauté (cet espace trouble entre deux eaux comme l’halocline*), l’abandon à la découverte d’un nouvel univers, sans pour autant céder à la tentation de déclarer l’ancien suranné et le nouveau comme exclusive et unique possibilité de vie. Je dois écouter, identifier, comprendre ou tout au moins accepter les limites de l’autre dans le cadre de cette relation (la vérité de l’autre).

Donc même si souffrir était l’épice de ma dernière relation, ce ne sera peut-être pas l’ingrédient de ma prochaine si tant est que je m’efforce d’être attentif à l’autre, à la relation, et que je m’applique à n’investir que ces espaces où le bonheur peut croître au lieu de rester en souffrance parce que la rencontre ne me fait plus du bien.

Ne te fâche pas avec le puits parce qu’il ne te donne plus d’eau.
Demande-toi plutôt pourquoi tu t’évertues à continuer à chercher de l’eau là où il est maintenant clair que tu n’en trouveras pas.

* Halocline : Là où se mélangent deux eaux qui ont un degré de salinité différent. La visibilité peut être très bonne en eau salée ou en eau douce, mais là où elles se mélangent, c’est trouble (voir plongée en Cénotes).


Ils en parlent :

La rencontre - Charles Pépin
Éloge du risque - Anne Dufourmantelle

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